Anna et le Roi

par Noan  -  29 Juillet 2020, 18:45  -  #Cinéma, #Biopic

Anna et le Roi

1862. Deux ans après avoir perdu son mari, Anna Leonowens quitte l’Inde avec son jeune fils Louis et se rend au Siam afin d’assurer l’éducation des 58 enfants du Roi Mongkut. Derrière la beauté exotique et l’opulence de la Cour, l’institutrice découvre un monde complexe et secret, dominé par la figure d’un « dieu vivant » qui exerce sur ses sujets un pouvoir sans partage.

Accueillie avec méfiance en tant que femme occidentale et représentante de « l’impérialisme britannique », Anna se montre à la fois ferme et diplomate, n’hésitant pas à bousculer le protocole et à user de toute l’autorité que lui confèrent sa fonction et ses convictions personnelles. Le Roi, qui aspire à réformer son pays, accepte volontiers ses entorses à la tradition qui l’amusent, tout en s’opposant fermement à toute contestation d’ordre culturel ou politique qui mettrait en cause les valeurs fondamentales du royaume.

Les heurts sont donc fréquents entre ces deux fortes personnalités, mais la joute, aussi vive soit-elle, n’entame pas l’estime réciproque que se vouent Anna et le Roi. Derrière le monarque absolu, l’institutrice découvre, au fil des mois, un homme légitimement inquiet de l’avenir de sa dynastie et fragilisé par des intrigues de palais qui menacent directement sa sécurité. Un homme courageux, lucide, généreux, séduisant, fier et dominateur, dont elle marquera à jamais la vie.

Après Anna et le roi de Siam de John Cromwell, en 1946, après le succès mondial du Roi et moi de Walter Lang, avec Yul Brynner et Deborah Kerr, adaptation, en 1956, d’une comédie musicale homonyme de 1951, après le dessin animé du même titre (1998), Anna et le roi est cette fois interprété par Jodie Foster et Chow Yun Fat, sous la direction d’Andy Tennant et produit par la Century Fox.

Les paysages sont grandioses, le jeu de lumière sur le décor nous fait voyager sur notre fauteuil ; Jodie Foster, égale à elle même, est pourtant loin d’être représentative d’une « Anna » à l’anglaise, un peu trop « franco-américaine ». Kristin Scott Thomas, initialement pressentie pour le rôle aurait certainement eu cette réserve caractéristique des britanniques qui manque singulièrement à Jodie Foster… Mais Jodie est Jodie et on comprend pourquoi elle a accepté ce rôle. Tandis qu'elle voulait offrir à son fils Charles une ouverture à d'autres cultures, c'est exactement le motif qui pousse Anna à venir au Siam. La curiosité. C'est d'ailleurs le plus beau message du film : le métissage, la découverte, l'apprentissage, et évidemment la communication entre les civilisations... Une vision et un enseignement qui contribueront au maintient de l'Indépendance du Siam, à l'abolition de l'esclavage et à la réforme de la justice, par le fils du Roi, et élève d'Anna.

La véritable surprise de ce film vient de Chow Yun Fat qui tient son « trône » en vrai roi, comme s'il avait tenu ce rôle toute sa vie. Conférant au Roi Mongkut une véritable dimension politique bien que plus jeune. En effet, en 1862 Mongkut était alors âgé de 58 ans. Mais Poignant dans ses émotions, son jeu n'est en rien rigide. Il est parfait. Une excellente performance nous montrant à quel point son statut de star du cinéma de Hong Kong n'est pas usurpé. L'alchimie entre les deux acteurs est parfaite, grâce à une certaine légèreté dans leur façon de s’appréhender l’un l’autre. Ils se devinent, se cherchent, avec en fond un jeu du chat et de la souris… et tout cela ils nous le font partager.

Une nouvelle version, donc, de la touchante histoire d’une préceptrice anglaise à la cour du roi du Siam. Bien que le principe de l'histoire semble avoir déjà été épuisé, cette version, en plagiant allègrement les deux films suscités, ne possède, malheureusement, ni le lyrisme de l'un ni la passion de l'autre ; la scène de la valse, mythique lorsqu'on connaît les autres adaptations cinématographiques, est un peu escamotée mais la direction artistique est globalement superbe et la mise en scène efficace et fluide. On s'amusera de la critique envers le leader britannique et son arrogance, des piques anti-colonisatrices ; on regrettera aussi une vision caricaturée d'un Siam analphabète, rural, dévoué à son monarque et un scénario parfois trop illustratif : pour exemple, on retiendra qu'on ne voit plus Anna enseigner dès la seconde moitié du film... Dommage.

Descendue par la critique, cette version reste, malgré tout, un film à grand spectacle qui ne déçoit pas : costumes, paysages, reconstitutions, tout y est, avec, en plus, quelques beaux travellings, même si Andy Tennant n'abuse pas des mouvements de caméra. Le contexte géopolitique n'est pas négligé : révolutions de palais, importance des puissances coloniales, difficile passage de la féodalité à la modernité, le film a une vertu pédagogique certaine. L'intrigue romantique est traitée avec beaucoup de retenue. Une belle réussite malgré quelques lenteurs qui nous font perdre le fil de l'histoire et nous laissent, hélas, le temps de regarder nôtre montre, mais lorsque le paysage apparaît, tout s'efface et l'on reste fasciné par la beauté de ce décor et de ce pays.

 

Noan Benito Vega
A suivre :
La dynastie Chakri, les roi du Siam

Anna et le roi
États Unis – Comédie Sentimentale – 1999
Un film d’Andy Tennant
Avec Jodie Foster et Chun Yun Fat

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